Aujourd’hui dans portrait de longeur, nous nous entretenons avec une longeuse, mais aussi l’auteure du magnifique livre “L’aventure longe-côte, le littoral réinventé”
Vieillard Sylvie, 48 ans, je vis dans le nord Finistère avec mes 3 enfants.
J’ai voulu montrer à quel point il s’agissait d’un vrai sport, d’une vraie aventure à chaque fois renouvelée.
Géographe de formation, chargée de communication en environnement et éditrice aux Éditions Buissonnières, auteur de quelques ouvrages. Géographe, j’ai travaillé dans l’environnement avant de me réorienter dans l’édition. Je voulais essayer de participer à faire des livres qui parlent d’environnement mais qui restent attractifs et donnent envie d’être lus par tout un chacun.
Comment as-tu découvert le longe-côte ?
J’ai commencé à voir des longeurs près de chez moi, j’ai voulu essayer
À 40 ans passés, j’ai fini par trouver l’occasion de quitter la région parisienne et de m’installer à la campagne en famille. Il s’est trouvé que cette campagne était aussi au bord de la mer, dans le nord Finistère. Ancienne sportive ayant dû arrêter le sport pour mes études puis élever mes enfants tout en travaillant, je voulais reprendre une activité sportive extérieure. Avec l’âge et quelques blessures passées, l’athlétisme n’était plus possible.
J’admire profondément la mer mais n’ai jamais eu l’occasion de pratiquer un loisir nautique : tout apprendre à mon âge me semblait impossible. J’ai commencé à voir des longeurs près de chez moi, j’ai voulu essayer : ils m’ont ouvert les bras et l’ambiance, ainsi que le sport bien sûr, m’a conquise. J’ai aussi été profondément heureuse de pouvoir reprendre la compétition que j’avais dû arrêter pour travailler pendant mes études étant plus jeune.
Aujourd’hui quelle place a le longe-côte dans ta vie ?
Quand vous entendez « allez maman, vas-y, tu sais pourquoi tu as voulu faire cette compétition », ça décuple les forces comme jamais.
C’est ma part de vie dehors obligatoire, c’est mon hygiène de vie. Si j’arrête, je recommence vite à avoir très mal au dos d’ailleurs. Avec le longe-côte, j’arrive à trouver l’organisation pratique et la motivation pour faire du sport, en extérieur, assez intensivement deux à 5 fois par semaine. J’essaye aussi de rester au niveau des compétitions car c’est une belle émulation pour aller au-delà de soi, de sa zone de confort. Par ailleurs, marcher en longe en équipe créé des échanges fabuleux. Les courses, en individuel et surtout en équipe, sont des moments inoubliables.
J’ai aussi la chance d’être assistante dans mon club. Se mouiller un peu pour proposer des séances sympas (et en toute sécurité) aux longeurs, c’est aussi un très bel échange dans les deux sens dont je profite beaucoup à titre personnel. J’apprécie la gentillesse qui se dégage toujours dans ces groupes d’aquamarcheurs. Chacun est attentif aux autres. J’essaye d’apporter de l’attention à chacun et un maximum de bonne humeur. Quand les moments sont plus durs, il ne me faut pas plus de 10 mn dans l’eau pour tout oublier.
Enfin, j’ai la chance de pratiquer le longe côte avec un de mes fils. Ce sont de purs moments de bonheurs que l’on échange, d’autant que la pratique sportive est pour moi un message essentiel à transmettre aux jeunes. Vivre une compétition en famille, ça ne s’oublie pas. Quand vous entendez « allez maman, vas-y, tu sais pourquoi tu as voulu faire cette compétition », ça décuple les forces comme jamais.
À quel moment est né le projet du livre ?
Mon cerveau de géographe a alors jubilé devant l’image suivante.
Je devais faire du longe côte depuis 2-3 ans. Les mots sont venus tous seuls. Je rentrais d’une séance, je prenais une feuille et j’écrivais. J’avais tellement envie de raconter tous ces moments que nous vivions dans l’équipe. De la gentillesse, de la compassion, un énorme courage de la part d’une vingtaine de « petits vieux » tels qu’on aurait pu les considérer de l’extérieur, alors que dans l’eau, on venait d’affronter de sacrées vagues, un froid de canard qui vous gelait les joues, ou une grêle intense à ne plus savoir où se mettre. C’était tellement d’émotion et de beaux partages. Tout le monde exprimait chaque fois son amour pour ce sport et la beauté du lieu dans lequel nous marchions.
Il fallait que j’écrive pour eux, que je leur rende hommage. En voyant tous ces pratiquants dépasser clairement leurs limites personnelles, j’ai voulu montrer à quel point il s’agissait d’un vrai sport, d’une vraie aventure à chaque fois renouvelée. Pas besoin d’aller à l’autre bout du monde avec des moyens prodigieux : les longeurs s’imposent une aventure en allant marcher en mer.
Mon cerveau de géographe a alors jubilé devant l’image suivante. Ce trait sur les cartes qui marque la limite entre la terre et la mer, nous, longeurs, nous l’écartons pour y marcher, pour y trouver notre zone de marche avec notre bon niveau. Il est là, notre terrain d’aventure. D’où le sous-titre du livre : « le littoral réinventé ».
Quel message souhaites-tu faire passer à travers cet ouvrage ?
J’aimerais que les longeurs puissent se sentir d’autant plus fiers d’eux et de leur sport en lisant ces témoignages et en les faisant lire à leurs proches. Tous les pratiquants peuvent être heureux de pratiquer un tel sport, il n’y a pas d’un côté les grands sportifs (réellement remarquables soit dit en passant) et les autres. Nous sommes une sacrément belle communauté de passionnés et de gens sportifs et courageux.
Nous sommes une sacrément belle communauté de passionnés et de gens sportifs et courageux.
Je ne doute pas que ce sport continue à se développer dans les années à venir tant il apporte de nombreux bienfaits. Je voulais donc rendre hommage par l’écrit, durablement, aux inventeurs de ce sport et à Thomas Wallyn en particulier. Réécrire l’histoire d’un sport qui nait, ce n’est pas si courant. Comme tous ceux qui se battent pour permettre à ce sport de se développer, ce sont des gens profondément bons et ouverts aux autres. Ils nous tracent une voie originale en ce XXIe siècle, à la fois dynamique, inventive et respectueuse de tous et de l’environnement.
J’aime que plus de monde s’intéresse ainsi à la mer, à la qualité des eaux de baignades, à nos plages. C’est un peu comme votre association du sud-ouest « du Flocon à la vague » : sentons-nous responsable de cet environnement merveilleux. Plus on le connaît intimement, plus on le soignera. Enfin, faisons une place parmi nous aux autres sportifs, à ceux qui ont du mal, qui souffrent, sont malvoyants, ou que l’on pense tout simplement un peu différents de nous. Ils nous apprennent tellement ; le courage surtout…
Soyons tous longeurs ensemble.
Photos 1 et 2 José Le Moigne